En dépit de la crise, dans le XVIIe arrondissement de Paris, les prix se maintiennent à des niveaux élevés pour les logements de qualité. A l'inverse, quel que soit le quartier, chic, bobo ou plus populaire, les biens imparfaits sont sanctionnés.
Par Anne-Sophie Vion
Le XVIIe arrondissement a été rattrapé par la crise sanitaire du Covid-19, à l'image de l'ensemble de Paris intra-muros, qui voit ses prix refluer . Certes, le prix moyen de cet arrondissement coté du nord-ouest de la capitale, s'établit encore au-dessus de la barre des 11.000 euros le m², à 11.641 euros le m², au 1er juillet, selon les données de Meilleurs Agents. Mais, sur douze mois glissants, le mètre carré moyen y chute de 1,7 % alors qu'il s'apprécie de 4,8 % en deux ans et de 23,2 % en cinq ans.
Aucun quartier du XVIIe n'échappe au repli. C'est le cas de ceux localisés au nord-est, désormais desservis par la ligne 14 du métro (et bientôt par le tramway T3 prévu à l'horizon mi-2023) et où figurent un palais de Justice et un écoquartier flambant neuf. Y vit une population tout à la fois populaire, cosmopolite et bobo. Il s'agit des Epinettes et des Batignolles, en baisse respectivement de 0,4 %, à 10.513 euros/m², et de 0,5 %, à 11.771 euros/m², sur un an, au 1er juin.
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« Le confinement a mis en pause la forte dynamique du marché immobilier des Batignolles de plus en plus attractif depuis 10 ans et dont les prix évoluaient jusqu'alors à la hausse », observe Yan Kahil, directeur associé de Batignolles Immobilier. Ce qui ne veut pas dire que l'arrondissement ne plaît plus. Les acheteurs sont toujours là mais les transactions ne s'effectuent plus au même prix.
Quoique « les biens sans défauts se vendent toujours très chers », nuance Yan Kahil. C'est le cas de cet appartement de trois pièces, dont deux chambres, dans un immeuble avec ascenseur des années 80 localisé à proximité du parc Martin-Luther-King, un espace vert de 10 hectares, non loin du square des Batignolles. L'appartement s'est vendu 950.000 euros pour 75 m², soit plus de 12.600 euros le m² ! Il est vrai qu'il bénéficie de critères encore plus appréciés par les ménages depuis la pandémie, à savoir un balcon avec vue dégagée, en étage élevé, et une exposition au soleil.
Meilleurs Agents
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A l'inverse, dans ce quartier prisé jusqu'à récemment des classes moyennes et des familles, les appartements standards dans l'ancien, des deux ou trois-pièces, sans vue, sans ascenseur et sans balcon, soit le type de biens le plus répandu dans ce secteur, ont dû « revoir leurs ambitions ». Avant-Covid, ils se négociaient entre 11.000 et 12.000 euros le m², et leur prix ne cessait de grimper, désormais, ils partent plutôt autour de 10.000 à 11.000 euros le m². Les acheteurs ont clairement repris la main. Ce sont souvent des primo-accédants, des trentenaires, jeunes actifs, dans le secteur de la finance, aux revenus élevés et disposant d'un apport important, qui souhaitent rester Parisiens.
Ils apprécient la « vie de village » de ce quartier charmant, à la fois vivant et calme, où fourmillent restaurants et commerces branchés, derrière le square des Batignolles et l'Eglise Saint-Marie des Batignolles, entre le métro Pont-Cardinet et Brochant. Ils y deviennent propriétaires de deux-pièces, entre 40 et 50 m², rue Brochant, rue Nollet, rue des Moines, par exemple. Les négociations sont actuellement de l'ordre de 5 %, « les vendeurs, restant globalement encore aux prix d'avant-Covid », témoigne Yan Kahil.
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Dans cette période inédite, les stocks d'appartements à vendre se reconstituent. Ce qui ne s'était pas vu depuis longtemps. Parmi eux, des trois-pièces qui ne sont plus du goût des familles. Certaines préfèrent partir en province pour acheter plus grand, plus vert et avec un extérieur, avec le même budget ou à un budget moindre. Les appartements familiaux en rez-de-chaussée souffrent comme ce 85 m², trois chambres, dans un immeuble ancien de la rue Truffaut. Mis en vente à 1 million d'euros, il ne trouve pas preneur. Les propriétaires viennent de baisser le prix à 895.000 euros !
Les petites surfaces, notamment des locaux commerciaux en rez-de-chaussée, transformés en logement, et les chambres de service sont également à la peine. Leurs propriétaires les mettent en vente, jetant l'éponge de la location saisonnière de type Airbnb. C'était déjà le cas avant la crise, en raison du durcissement de la réglementation dans la capitale , mais ce type d'investissement locatif a été encore plus mis à mal avec la crise sanitaire et la chute du tourisme et des voyages d'affaires. 
Le secteur le plus chic de l'arrondissement, à savoir les rues proches du parc Monceau, dans le quartier de la Plaine-Monceaux, n'est lui aussi pas imperméable à la crise. D'après Meilleurs Agents, les prix y sont en baisse de 1,7 % sur un an, au 1er juin. Contrairement aux quartiers des Batignolles et des Epinettes, on y trouve de plus grandes surfaces et des hôtels particuliers. 
Mais tout ne part pas au prix fort. « Les biens de 180 à 200 m², qui ne sont pas parfaits (vis-à-vis, étages bas, travaux…), et qui se vendaient sans difficulté il y a deux ans, entre 13.000 et 15.000 euros le m², ont plus de mal aujourd'hui, observe Geoffrey Benoit, directeur Elysées Monceau Paris Ouest Sotheby's International Realty. Ils se négocient avec décote entre 11.500 et 13.000 euros le m². Les vendeurs non pressés les retirent du marché. »
Toujours dans ce quartier, « les appartements familiaux situés en étage élevé, avec une bonne exposition et dans un bon format, à savoir 3 chambres et sans perte d'espace, partent très rapidement et à un prix élevé, entre 12.500 et 14.500 euros le m² », souligne aussi Elodie Lacarrière, directrice de l'agence Junot Monceau,
En s'éloignant vers la Porte de Champerret, le mètre carré descend autour de 12.000 euros, en moyenne. Et, Porte Maillot, secteur en travaux et où les commerces sont moins nombreux, les prix se négocient parfois en dessous de 12.000 euros le m².
Immobilier : pourquoi les prix parisiens vont rester élevés
A l'inverse, dans ce quartier, le luxe et l'ultra-luxe se portent encore mieux avec la crise. A la manoeuvre, des acheteurs très aisés, qui souvent ont fait fortune dans la finance et se sont expatriés. C'est le cas de Français vivant en Asie qui ont souhaité acheter à la fois un pied-à-terre à Paris et réaliser une opération patrimoniale. Ils ont acquis par « FaceTime », sans visite sur place, rue de Courcelles, un appartement de 234 m², refait à neuf, avec balcon filant, au 5e étage, dans un bel immeuble haussmannien, pour un montant de 4,1 millions d'euros. « Un prix très élevé dans ce quartier », précise Geoffrey Benoit.
De même, le directeur d'agence cite une offre en cours, à 5,7 millions d'euros, sur un appartement de 270 m²en duplex, en dernier étage, refait à neuf, climatisé, qui donne sur les grilles du parc Monceau. Soit plus de 20.000 euros le m² ! A contrario, rappelle Geoffrey Benoit, « dans ce même quartier très coté, un appartement familial de plus de 200 m², au 1er étage, moins lumineux, se négociera autour de 10.000 euros le m². »
Sur ce segment de l'immobilier de prestige, l'essentiel de la demande se porte sur les hôtels particuliers pour des budgets compris entre 5 et 7 millions d'euros. L'un d'entre eux, d'une superficie de 800 m², une piscine et un jardin de 100 m²,  est actuellement en vente au prix de 12,5 millions d'euros. Ce type de transactions se fait souvent sans publicité, off- market. La clientèle est très exigeante, veut se faire plaisir et est soucieuse d'être dans le meilleur secteur du point de vue des établissements scolaires comme le très prisé Lycée Carnot au 145 Boulevard Malesherbes.
Le promoteur Bécarré réalise une résidence de 7 étages à l'angle du passage Legendre et de l'avenue de Saint-Ouen, au pied de la station de métro Guy Moquet (ligne 13). La « Villa Legendre » compte 25 logements, dont 18 avec balcons, terrasses, caves, en accession libre. Leur prix sont les suivants :
· Studio : à partir de 335.000 € (pour une surface à partir de 21,8 m²), 
· T2 : à partir de 345.000 € (de 43,33 m²), 
· T3 : à partir de 695.000 € (de 47,61m²), 
· T4 : à partir de 1.350.000 € (de 92,64 m²), 
· T5 : à partir de 118,62 m² (montant non communiqué).
Livraison prévisionnelle : T2 2023
Source : Bécarré
. Un trois-pièces de 58 m², rue de la Jonquière, au 3e étage, sans extérieur. Vendu à 600.000 euros. (Batignolles Immobilier).
. Un appartement de 31 m², deux pièces, en rez-de-chaussée donnant sur cour et jardin, dans un bon état et situé dans un immeuble ancien, rue Bridaine. Vendu à 330.000 euros. (Batignolles Immobilier).
. Un appartement de 200 m² de 5 pièces, 3 chambres, entièrement refait, avec un jardin de 600 m² et donnant sur le parc Monceau. Vendu à 6 millions d'euros. (Sotheby's).
.Un appartement rue Alphonse-de-Neuville, en duplex, refait à neuf, de 185 m², sans extérieur et sans vis-à-vis, a été vendu à 16.000 le m². (Sotheby's).
. Un appartement de 45 m², proche de la mairie du 17e, au 2e étage, en bon état. Vendu à près de 12.500 euros le m². (Junot Monceau).
. Un appartement ancien au coeur des Batignolles, de 96 m², 3 chambres, une suite parentale, au 2e étage sur cour. Vendu à 13.200 euros le m². (Junot Monceau).
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Anne-Sophie Vion
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