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Le bassin d’Arcachon se divise en villes qui sont elles-mêmes prédécoupées en quartiers. Rien de nouveau sous le soleil, sauf que dans plusieurs parties du Bassin d’Arcachon les quartiers sont d’importants points de repères qui supplantent parfois les villes. Quand il ne s’agit pas d’un effacement pur et simple. Arcachon n’était au départ qu’un quartier de La-Teste-de-Buch et a été érigé en commune en 1857 par Napoléon III, après que les frères Pereire ont commencé à en faire un lieu accessible grâce au chemin de fer.
Un lancement doré sur tranche qui va ensuite attirer de nombreuses têtes couronnées, de portefeuilles bien garnis et installer le bassin d’Arcachon -au départ peuplé d’ostréiculteurs et de pêcheurs durs à la tâche- dans le monde ouaté des cités balnéaires les plus courues. Depuis une vingtaine d’années c’est la presqu’ile du Cap-Ferret, taillée en pointe et séparant à l’ouest le bassin d’Arcachon de l’océan, qui fait grimper les prix quasi à la verticale.
Sans se transformer en de nouvelles communes, les quartiers d’Arcachon et de Lège-Cap-Ferret, ont vu leur notoriété grimper en flèche, qu’il s’agisse (en partant de la pointe du Cap-Ferret et en remontant vers le nord) de la Vigne, l’Herbe, le Canon ou encore Piraillan.Tandis que le Pilat ou le Mouleau balisent le terrain du côté d’Arcachon. Popularisés par la chanson de Pascal Obispo, ces quartiers permettent aux habitants de suivre plus facilement l’actualité locale.
“Dans la commune de Lège-Cap-Ferret, il ne faut jamais oublier qu’il y a Lège et la presqu’ile du Cap-Ferret, qui sont deux marchés immobiliers différents. Sur la presqu’île, le marché a toujours été trop cher. A chaque vente dans le quartier de l’Herbe ou celui du Canon les gens se disent, non ce n’est pas possible d’atteindre des prix aussi fous ! Pourtant c’est ce qui arrive. Et plus le temps passe et plus les prix grimpent. Au Cap-Ferret des acquéreurs n’hésiteront pas à mettre 2,5 millions d’euros pour s’acheter une belle cabane face à la mer pour y jouer les Robinson” recadre en substance Me Matthieu Vincens de Tapol, président de la Chambre des notaires de la Gironde.
Ce dernier évoque aussi des maisons vendues trois à quatre millions d’euros dans le quartier du Petit Piquey (Lège-Cap-Ferret), d’autres en première ligne (face à la mer) cédées pour sept à huit millions d’euros au Canon. Sans oublier un record de première ligne signé au Cap-Ferret pour 17 millions d’euros… C’est ainsi que Lège-Cap-Ferret se retrouve aujourd’hui tout en haut du palmarès national de l’immobilier de luxe. Comme le montre l’enquête nationale dévoilée le 31 mars dernier par Coldwell Banker-PriceHubble, la commune de Lège-Cap-Ferret, déjà classée par les spécialistes dans « les territoires traditionnels du luxe », émarge en 2021 à la première place nationale des villes les plus chères pour les biens de prestige, avec un prix moyen de 17.997 euros/m2, devant Neuilly-sur-Seine (17.368 euros/m2) et Cannes (16.461 euros/m2) !
“A Arcachon, au Pilat (face à la presqu’île du Cap-Ferret -Ndr), il y a toujours des maisons secondaires typiques de style basco-landais. Mais aujourd’hui, avec la montée en gamme provoquée par un niveau beaucoup plus élevé du montant des investissements financiers réalisés, les équilibres et les styles changent. Depuis la pandémie de Covid-19, de nombreuses maisons secondaires sont devenues des lieux de télétravail pour des chefs d’entreprises proches de la retraite, qui se rendent encore régulièrement à Paris. Mais la demande pour ce type de bien est énorme et l’offre très déficitaire, si bien qu’il n’y a que très peu de transactions”, analyse Jean Anselyn, directeur de Barnes International à Arcachon.
Le déséquilibre entre l’offre et la demande atteint un écart tellement énorme sur le bassin d’Arcachon que la mise sous tension du marché des biens immobiliers de luxe produit une poussée quasi-continue des prix à la hausse.
“Sur le bassin d’Arcachon c’est davantage la demande qui fait le marché que l’offre”, résume d’un trait David Tignard, cofondateur du cabinet Lafitte et Associés, à Bordeaux, passé par Coldwell Banker.
Pour de nombreux professionnels de l’immobilier neuf et du terrain à bâtir, l’irruption des ventes aux enchères est généralement un mauvais symptôme, qui signale une situation de rupture interne. Avec un marché qui n’a plus assez de stock pour s’équilibrer et qui commence à avoir à fonctionner au coup par coup, sous la pression d’une forte demande qui ne trouve pas sa contrepartie. C’est alors qu’au lieu de mettre le bien immobilier à céder sur une affichette en vitrine dans une agence immobilière, le propriétaire préfère d’entrée opter pour la vente aux enchères, parce qu’il est sûr que le prix payé par le client sera supérieur à celui qu’il propose.
Un villa à ossature avec piscine sur le bassin d’Arcachon : un produit qui peut valoir très cher (Lafitte et Associés).
Dans ce contexte, une annonce immobilière récente sur le bassin d’Arcachon n’est pas passée inaperçue. Il s’agit d’une vente aux enchères organisée le 29 juin prochain pour une villa de 190 m2 (8 pièces dont 6 chambres) au Cap-Ferret, avec terrasse, et un terrain de 2.066 m2, qui sera proposée à 4,5 millions d’euros…
Alors est-ce le début de la fin ? Pas pour Me Vincens de Tapol qui tient à ramener cette vente à de plus justes proportions.
“Des enchères il y en a toujours eu sur le bassin ! Car à cause du niveau des prix, les partages familiaux deviennent vite compliqués. Les ventes aux enchères interviennent pour sortir d’une indivision ou pour faire face à une créance bancaire. En pratique c’est très rare. Même en cas d’indivision, les héritiers se débrouillent aussi longtemps qu’ils le peuvent pour tenir, mais au bout de la deuxième ou de la troisième génération, avec la hausse continue des prix que nous connaissons par exemple à Lège-Cap-Ferret, ça devient fiscalement intenable.”
De fait, malgré cette fièvre du luxe, le marché immobilier conserve encore sur le bassin d’Arcachon un mode de fonctionnement classique. Même si les chiffres en jeu n’ont plus rien à voir avec ceux du commun des mortels. C’est ainsi que dans le quartier Piraillan (Lège-Cap-Ferret) une annonce présentée en agence immobilière proposait encore fin mai une villa de 330 m2, disposant de 2.000 m2 de terrain, avec vue sur l’Ile aux Oiseaux et la dune du Pilat (en face du Cap-Ferret) pour la somme de 8,99 millions d’euros !
L’étude de Coldwell Banker-PriceHubble juge que la ville d’Arcachon subit la poussée de la demande des Parisiens et des Bordelais. Si bien qu’en 2021 le prix au mètre carré a grimpé de +15 % pour atteindre 11.500 euros/m2. Avec un prix médian pour les biens immobiliers de luxe de 1,69 million d’euros qui a bondi de +48 % l’an dernier ! Rappelons que, selon la même étude, le prix de vente médian des biens immobiliers de luxe a de son côté bondi de +49 % à Lège-Cap-Ferret à 2,9 millions d’euros.
“Nous assistons à un transfert de pouvoir d’achat entre Paris et le bassin d’Arcachon. Avec le Covid, les Parisiens sont partis à la recherche de calme et de vert. Les fortes tensions sur le bassin d’Arcachon n’empêchent pas qu’il y ait une grosse activité du côté du Pilat (sur la berge en face de la presqu’ile du Cap-Ferret -Ndr). Il y a énormément d’argent qui s’investit au quartier du Mouleau et au Pilat, au sud du bassin d’Arcachon”, tient à souligner Jean Anselyn.
Les professionnels confirment toutefois que, pour l’essentiel, les Bordelais arrivent encore à acheter au nord du bassin, à partir d’Andernos puis vers l’est. Autre force motrice de cette machinerie immobilière du luxe sur le bassin d’Arcachon : l’hôtellerie de luxe. L’installation d’hôtels cinq étoiles, comme La Coorniche ou Haaïtza, au Pilat, met littéralement ces derniers en orbite immobilière haute, si besoin était. Et comme les hôteliers sont nombreux et motivés sur ce segment de marché, la machine ne risque pas -sauf accident- de s’arrêter de sitôt.
Les boursicoteurs connaissent tous l’adage selon lequel les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, mais au bassin d’Arcachon, et en particulier à Lège-Cap-Ferret, ces derniers donnent l’impression d’être aspirés par l’azur. Et pour le moment personne ne se risquerait à dire qu’il existe au-dessus des toits du Cap Ferret un invisible plafond de verre capable de stopper la faramineuse hausse des prix en cours sur la presqu’île.
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La Tribune publie cette semaine une série de trois articles sur l’immobilier de luxe en Nouvelle-Aquitaine :
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